Dossier leash surf
HISTOIRE DU LEASH ET EVOLUTION TECHNIQUE:
Il est impossible de savoir qui a eu le premier l’idée d’attacher sa planche pour ne pas la perdre.
Dès 1935, Tom Blake, un célèbre shaper californien de la première heure, avait testé un système d’attache constitué d’une corde en coton reliée à sa ceinture, mais vu le poids des planches de l’époque ça s’est révélé plus dangereux qu’utile.
Le premier à avoir breveté officiellement un leash fonctionnel est un français, un des premiers surfeurs basques nommé Georges Hennebutte, qui créa en 1958 le « Fil à la patte ». Un bracelet de cheville en sangle fermé par boutons pression (le Velcro ne fût disponible qu’en 1960) , et un sandow fixé à un bouchon d’évier en caoutchouc collé à l’arrière de la planche (l’ancêtre du plug moderne).
Mais ça n’eut aucun succès et son brevet ne couvrait que la France. Il inventa aussi la première planche gonflable, qui n’eut aucun succès non plus. L’histoire complète racontée par le neveu de l’inventeur.
Nous allons voir qu’il avait raison sur beaucoup de choses, et est vraiment le père du leash moderne.
L’inventeur « officiel » du leash, cité dans la plupart des manuels, est Pat O’Neill, surfeur californien de Santa-Cruz.
En réalité il fût seulement le premier à utiliser un genre de leash en compétition, en 1971, un tube en caoutchouc chirurgical fixé par ventouse à l’avant de la planche et noué autour de son poignet. Ce montage était censé aussi permettre de mieux « conduire » sa planche en tirant sur le leash comme sur les rennes d’un cheval.
Mais il y avait de gros défauts: c’était gênant pour ramer et le tube était fragile, trop élastique, et directement orienté vers le visage ! Son propre père Jack, surfeur lui-aussi et fondateur de la marque de combinaisons O’Neill, perdit un oeil suite à la rupture du tube caoutchouc qui lui revint dans l’oeil ! Le célèbre logo de sa marque est d’ailleurs depuis lors sa photo, barbu et borgne avec un bandeau de pirate. Ironie de l’histoire ….

Premier leash utilisé en compétition en 1971, relié à l’avant du surf et au poignet

Logo Jack O’Neill
Ce système n’avait qu’un lointain rapport avec un leash moderne, mais comme il fut employé dans une compétition officielle en Californie, le retentissement fut très grand. Et on se rappelle plus de Pat O’Neill que du français Georges Hennebutte 🙁
Rapidement le système fût modifié, par un autre californien, Larry Block, qui remplaça le tube par un sandow plus résistant, avec une simple boucle pour y passer la cheville, et fixé à la planche grâce à un trou percé dans la dérive. Il commença à vendre sa production sous la marque Block Enterprises, et fit la première pub pour un leash à 5$ dans Surfing Magazine.

Première publicité pour un leash
Le câble nu faisant mal à la cheville, Larry ajouta une boucle de sangle. C’est vous dire à quel point c’était vraiment du bricolage ….
Pour éviter d’abîmer la dérive, les planches furent dotées progressivement d’un pontet (excroissance en fibre de verre) sur l’arrière, qui évolua pour donner le « Plug » moderne, ou d’un insert percé traversant la planche pour certains longboards avec boitier de dérive.

Pontet de leash 1974

Plugs de leash

Boucle traversant la planche jusqu’au boitier de dérive
Avec le succès grandissant, de nombreuses marques américaines et australiennes firent leurs propres modèles, dont MNP, Cadillac Surf Company, Pipe Line, Control, Balin, Surf More … en rajoutant progressivement des améliorations.
- Modèle Surf More avec encore un tube caoutchouc, et un des premiers bracelet de cheville en sangle à velcro (non matelassée). Notez qu’il n’y a pas encore de « Rail saver » ni d’émerillon, mais en revanche la jonction bracelet/tube est assez sophistiquée, c’est une pièce en plastique moulé rigide sur laquelle le tube s’enfile d’un coté et la sangle du bracelet de l’autre. C’est la préfiguration des embouts moulés modernes.
Leash Surf More années -70
- Cadillac Surf Company, marque pionnière dans les roues de skate en uréthane (le surf et le skate étaient très liés à l’époque), profite de son expérience du matériaux et utilise pour la première fois un câble en uréthane massif.
Cela a été une évolution majeure en éliminant le danger d’un retour de planche trop rapide car l’uréthane a une élasticité progressive. Il s’étire lentement avec un effet amortisseur, puis revient lentement en place sans « coup de fouet ».
Immédiatement, tous les autres fabricants de leashes font la même chose, et le caoutchouc disparaît.Câble uréthane
- L’émerillon, pièce pivotante qui permet d’éviter que le câble se tortille sur lui-même. D’abord celui des pêcheurs, puis un modèle spécifique au surf. En cuivre, puis en laiton nickelé, puis en inox.
Émerillon de pêche / émerillon de leash moderne
- Le « Rail Saver », qui protège le bord de la planche des frottements du câble, comme la sangle large d’un sac à dos vous protège l’épaule.
Au début il fallait nouer la cordelette de fixation directement dedans, puis on ajouta un double Velcro pour le mettre en place facilement.« Rail Saver » -80’s sans Velcro
« Rail Saver » -90’s à attache Velcro
On arrive ainsi au leash typique de la fin des années -80:
Un bracelet de cheville à Velcro matelassé néoprène + câble uréthane noué + un ou deux émerillons + le Rail Saver.
Remarquez que la jonction bracelet velcro/câble était souple => le câble se repliait trop facilement et avait tendance à se prendre dans les jambes.

Leash -80’s
Les embouts moulés des années -90:
Jusqu’au début des -90’s les câbles uréthane étaient montés par des noeuds fait à la main et recouverts d’une gaine plastique thermorétractable. C’était très solide, mais long à fabriquer.

Noeuds de montage « A l’ancienne » du câble avec l’émerillon et le rail saver
Pour faciliter la production, les noeuds sont remplacés par des embouts plastique moulés à la machine, avec l’émerillon encastré et rivé/vissé dedans.
Sur le bracelet à velcro est cousue une autre pièce en plastique moulée, rigide, pour faire la jonction.

leash milieu -90’s made in USA
L’avantage d’une jonction rigide c’est que le câble part à angle droit, et se prend moins dans les jambes.
Mais si c’est trop rigide, la pièce cousue au bracelet fait levier quand le leash tire fort, ce qui est douloureux pour la cheville 🙁
Remarque: Le modèle jaune en photo date du milieu des -90’s et était encore « Made in USA » (c’est pour ça qu’il marche encore …).

Jonction trop rigide faisant levier contre la cheville
Pour éviter ça, la pièce cousue au bracelet a évolué vers un plastique plus souple moulé en forme de diabolo.

fixation assouplie
On arrive ainsi au leash typique commercialisé actuellement:

leash 2015
Problèmes de fiabilité:
Chacune de ces générations de leashes avaient leurs points faibles, et on pourrait croire que maintenant tout est parfait. Il n’en est rien !
Le point faible des leashes modernes tient en 3 mots, malheureusement de plus en plus fréquents: MADE IN CHINA
La mondialisation et la consommation effrénée ont conduit les marques à sous-traiter entièrement leur fabrication en Chine. Il fallait plus de marge financière pour tout le monde (Marque, transport, distributeurs, magasins) plus le Team et la pub indispensable pour se faire une place au soleil. Tout en gardant un prix client raisonnable à cause de la concurrence.
Un produit sortant d’une usine chinoise voit son prix multiplié par environ 5 ou 6 avant d’arriver entre les mains du client final ! Cela veut dire qu’il faut rogner sur le moindre 0,1$ à la production.
De plus, les marques ont beaucoup moins de contrôle sur le processus de conception et de production, situé à 15 000 Km de leurs confortables bureaux californiens ou Hawaïens, et s’occupent en réalité surtout de l’aspect marketing.
C’est ainsi qu’on se retrouve avec certaines séries de leashes (pour ne parler que des leashes …) mal conçus ou défectueux, qui vous claquent dans les pattes sans raisons 🙁 🙁
Certains tiennent parfaitement, et d’autres se cassent avant même d’avoir été à l’eau, c’est la loterie !
Bien sûr, chaque année il y a de nouveaux modèles, et chaque année on vous dit « Là c’est bon, c’est du super matos » ….. va savoir ….

Embouts cassés et décollés

Embout neuf cassé
Il y a depuis peu un mouvement de « Retour aux sources » qui conduit quelques marques authentiques à revenir aux fondamentaux, et à se réapproprier une partie de la conception/fabrication de leurs produits, même si le coût de la main d’oeuvre dans nos pays riches est trop élevée pour tout refaire « à la maison » 🙁
EDEN Surf n’est pas une marque historique du leash, mais nous essayons de participer à notre modeste échelle à ce mouvement « BACK TO BASICS » .
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